Révélation - Enthüllung
« Dimanche 27 mai 1945 […]
Depuis
hier le courant est revenu. Fini le temps des bougies, des coups frappés à la
porte, fini le silence. À la radio on reçoit des émissions de la Berliner
Sender. Qui apporte essentiellement des nouvelles, des révélations, odeur de
sang, cadavres, horreur. Dans de grands camps à l’est on aurait brûlé des
millions de gens, principalement des Juifs. Avec leur cendre, ils auraient fabriqué de l’engrais
chimique. Et la meilleure, c’est que tout aurait été
scrupuleusement consigné dans d’épais registres, une comptabilité de la mort.
C’est que nous sommes un peuple ordonné. Tard dans la soirée est venu
Beethoven, et avec lui les larmes. J’ai éteint. Insupportable,
désormais. »
Anonyme, Une femme à Berlin (Gallimard,
2006 − ici traduction maison, mais si un lecteur a celle de Françoise Wuilmart
et qu’elle passe mieux…)
Une femme à l’arrière n’a rien su. Qui le notant par devers elle se tient là pour nous en témoigner. L’émouvant, c’est qu’à l’évidence cet individu grattant sur son cahier s’adresse à nous, « la postérité », la conscience universelle, et chacun devant soi. C’est qu’avec elle on vient de l’apprendre.