Nature
« Au moment où
elle ouvre la bouche pour manifester quelque chose, je lui glisse dedans ma
langue déjà pointée en avant (ça l’avait étonnée déjà comme j’arrive à parler
la langue coincée entre les dents) et je la tourne dans le sens inverse des
aiguilles d’une montre, comme on doit le faire, en spirale, de plus en plus
profond.
Jusqu’à toucher les ganglions pour l’obliger
à déglutir dans le haut-le-cœur prévu qui permet de la faire pivoter sur
elle-même en arrachant sa robe, d’éteindre d’un coup de pied l’interrupteur de
la lampe-tempête qui vacille au plafond, de lui saisir une fesse à la faveur de
l’obscurité d’une main comme on doit le faire et de lui serrer la nuque de
l’autre.
Quelquefois, j’ajoute une odeur de terreau
reconstitué, ou je cache un morceau de viande sous un meuble, pour créer une
ambiance plus nature. Ou des bruits de vache enregistrés : chocs sourds
dans les stalles + halètements. Répandre de la paille par terre. Porte en bois
gris délabré + grincement. Ampoule vacillante sur baladeuse fil de fer. Ciment
avec écoulement purin. Bruits sourds enregistrés sur paille molle.
Qu’est-ce que tu fais là à c’t’heure ?
− J’trais.
Renverser sur foin. Vas-y le corsage et, etc. »
......................................................./ Olivier Cadiot, Le Colonel des Zouaves (P.O.L., 1997) /
« Je vais progresser. Je ferai mieux la
prochaine fois.
Je saurai faire toutes les voix. Le bruit du
canon. Je ferai le pigeon voyageur. Les canards dans les mares. Le vent dans
les peupliers. Le bruit de l’eau + l’odeur de chèvrefeuille.
Je ferai le bruit de la terre sèche quand on
marche dessus. Le bruit de l’herbe qui se déplie après mon passage.
Crac-crac-crac dans la neige. »