Devant l'opéra (l'esprit des lieux)

"...peut-être un peu de ciel tombé, ou de très vieilles images, jetées là par mégarde, que l’on croyait perdues".

Jean-Michel Maulpoix

Devant l’opéra ce midi quelqu’un avait perdu des photos. Perdu ou dispersé, il y avait plusieurs pochettes dont le contenu traînait sur des deux cents mètres jusque dans la rue de Lyon, de dos ou de face, plus ou moins marquées d’un piétinement du public qui feignait plus ou moins l’indifférence, que ce fût discrétion, que ce fût gêne. Quelques-unes, seulement, déchirées. J’en ai pris deux avec moi, furtim. Datées d’avril 1998 et janvier 1996. On y voit la haute montagne enneigée au soleil. On y voit une jeune fille prenant une pose altière et qui ne sourit pas, par temps couvert, sur une plage de la Manche ou de la Mer du Nord.

On ne savait pas vraiment quel drame, si ç’avait été profaner ou s’immoler, quel amour je pensais, ou quelle tragédie (ou une fiction, une performance ? ,  ça une pensée qui allégeait. Rien qui le laissât croire).

C’est la vraie scène, devant l’opéra ; on voit des hommes s'y battre parfois, la nuit.